Le petit chinois qui soude les balises
Comme promis, j’ai reçu mercredi les 3 premières cartes prototypes.
Toutes belles, toutes brillantes, toutes dorées (c’est du vrai plaqué or, comme dans les boucles d’oreilles de maman!). Mais elles sont aussi toutes nues. Il a donc fallu aider ces demoiselles à s’habiller, afin qu’elles soient fin prêtes pour le grand soir.
Direction donc le labo. Je me mets dans la peau d’un petit enfant chinois le temps d’une journée.
Débordante de tendresse, la tenancière du lieu me propose un café. Je l’accepte sans réfléchir. Erreur fatale ! Vous allez vite comprendre pourquoi…
Pâte à sel souder !
On est en 2014. Il est fini le bon vieux temps des composants avec de longues pattes, qu’il fallait faire passer dans les trous de la carte. Oubliez le fer à souder et l’étain. Ici, on fait du SMD=Surface Mounted Device, ou Composant Monté en Surface.
La première étape consiste à déposer de la « pâte à souder » aux emplacements où vont venir les petits composants.
Comme son nom l’indique, il s’agit d’une pâte, composée de minuscules billes d’étain liées ensemble par du flux (un truc qui facilite la soudure − généralement de la colophane, comme la résine qu’on met sur les archets de violons). Quand on chauffe, ça fond et ça se transforme en vrai soudure, comme de par magie.
Une image piquée sur le net qui montre bien le avant / après. |
En général, on utilise un « stencil » = pochoir pour déposer la pâte aux bons endroits. Sauf que là pour 3 cartes, ça faisait cher le pochoir. Du coup je place la pâte à la seringue.
Faut pas trembler. Saloperie de café ! |
Ça donne un truc dans le genre |
Pick and Place
Ensuite, il faut poser les composants sur la carte.
Dans la vraie vie, ça fait longtemps que les machines ont remplacées les petits enfants chinois pour ce travail.
Vidéo d’une machine surement très très chère, que j’aimerais bien avoir au garage :
Mais comme il n’y a que trois cartes à assembler, j’utilise une méthode un peu plus artisanale. C’est là que le café fait vraiment mal !
Je commence alors par les composants les plus faciles : les « 0603 », comme 0,6 x 0,3 dixièmes de pouce, soit 1,6 x 0,8 mm. Ça fait pas gros, mais on s’en sort encore bien à la main. Délicatement, un par un, posés en plein dans la pâte.
Mieux que la pince à épiler : la seringue aspirateur ! |
Mais après, ça se complique. Notamment avec la boussole. Le machin fait 3 x 3mm, et là dedans ils arrivent à caler 16 soudures…
Cette fois, le café est plus fort que moi ! Il faut sortir les grands moyens. Je confie donc la toute petite puce à des doigts bien plus habiles.
Ne reste plus qu’à téléguider tranquillement jusqu’au bon emplacement.
Quand les reflets rouges du composant sont pile-poil au dessus des pistes du circuit, on le fait descendre, et hop le tour et joué !
Bleu, saignant ou à point ?
Ne reste plus que l’étape la plus importante. La cuisson !
À la maison, j’aurais utilisé ma fameuse poêle à électronique.
Mais comme ici on est entre gens respectables, et que j’avais un peu de matos sous la main, j’ai fait comme les pros, c’est à dire au four.
Ça n’a pas l’air comme ça, mais c’est ultra scientifique. Il faut bien gérer la température, pour que ça se soude bien, sans déformer la carte ni abîmer les composants, etc… Tout un art !
Fukushima style
Et puis comme c’est fun de jouer avec les rayons X, petite radiographie de la carte, histoire de vérifier que les composants ont bien été soudés à la bonne place et qu’il n’y a pas de court-circuits.
C’est gagné ! On voit même l’intérieur de la boussole ! |
Finissons-en !
Reste encore quelques petits détails.
Il faut quand même sortir le vieux fer à souder pour les quelques composants traversants : les supports des batteries, le connecteur du panneau solaire, l’ILS de l’anémo et le phototransistor de la girouette.
Un petit coup de nettoyage, et voilà nos cartes fin prêtes pour l’aventure :
Bon évidemment, je m’aperçois qu’il y a des petites erreurs sur ces premières cartes. Pas très grave, ça marche quand même. Mais il faudra les corriger pour le tirage des « vrais prototypes » (= les votres). C’est comme ça qu’on apprend !
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4 réflexions sur « Le petit chinois qui soude les balises »
bravo , belle aventure et beaucoup de passion .
Et tu trouves le temps de nous expliquer clairement tout ça, avec les photos, les schémas et tout et tout! Bravo
Jacques Bérard
Super travail Nicolas! Et merci pour les explications!
Ça fait plaisir de voir des passionnés
Yoyo
J'aime les artisans, surtout les artistes!