Comment j’ai failli faire doubler le chiffre d’affaire de Météo-France

Comment j’ai failli faire doubler le chiffre d’affaire de Météo-France

J’ai fait marcher la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 pour obtenir tout un tas de chiffres de la part de Météo-France.

Cette loi, c’est un truc génial, qui « reconnaît à toute personne le droit d’obtenir communication des documents détenus dans le cadre de sa mission de service public par une administration, quels que soient leur forme ou leur support. »

Ironiquement, c’est aussi cette même loi qui autorise MF à vendre ses données.

Bref, après un peu d’attente et quelques relances, je viens de recevoir ce que je voulais. Un jour plus tard et j’aurai eu le droit de faire appel à la CADA.

Donc maintenant, je peux officiellement affirmer que Meteo-Parapente.com a beaucoup plus d’utilisateurs que la section « Aérologie / Vol à Voile » d’Aéroweb. Mais ça, on s’en doutait.

La grosse surprise, c’est qu’à ce rythme, d’ici la fin de l’été, il y aura probablement plus de gens qui consulteront le Météo-Parapente fait par un amateur ignorant que la météo « aviation légère » officielle – toutes catégories confondues ! Là on se dit qu’il y a quand même un truc qui tourne pas rond…

Mais dans les séries de chiffres, il y a plein d’autres surprises. En fait je m’attendais à faire un constat assez triste, mais pas à ce point.

Le record, c’est la part des redevances récoltés en 2010 pour les données d’observation, qui est de …………… 0%.

Personne n’a acheté de données d’observation à MF en 2010 !!?? Comme la somme est arrondie au % près, ça nous laisse 10k€ de doutes, mais quand même ! Il font légèrement mieux les autres années, avec ~60 à 80k€ / an. Ce qui reste pas grand chose.

Arrive enfin l’info qui m’intéressait le plus : celle sur les modèles.

Donc on se souvient, lorsque je voulais avoir accès au modèle fin AROME pour faire Météo-Parapente, MF me demandait 80 000€. Et là je découvre qu’en 2013, la vente des données « modèles » a rapporté la coquette somme de 90 000 €. Et c’est la meilleure année !

Donc si papa maman avaient bien voulus vendre la maison, j’aurai pu acheter les données d’AROME et donc faire doubler le chiffre d’affaire de MF à moi tout seul ! Oui bon d’accord, ça n’est que le chiffre d’affaire « modèles », c’est un peu tricher pour faire un titre accrocheur.

N’empêche que ça nous amène à la fameuse question …

Parce que si je calcule bien, les packs « Données d’un modèle atmosphérique global » à 120 000 € + « Données d’un modèle atmosphérique à aire limitée » à 80 000 €, ça fait 200 000 €, soit un peu plus que 90 000 € de CA.

Idem pour le « Paquet RADOME 1 ou 2 ans », le pack « observations » lui aussi plus cher que le CA des 4 dernières années.

Les radars de précipitations s’en sortent un peu mieux, et encore…  « L’Abonnement au paquet annuel mosaïque nationale » est facturé 100 000 €, voir 150 000 € si l’on veut avoir le droit de diffuser les images sur internet. Les recettes, elles, s’élèvent à 180 000 € en 2013, contre 80 000 € en 2012.

Certes, ces recettes sont probablement issues de ventes à la découpe. Mais le problème apparaît de manière assez claire : Météo-France ne vend pas ses données. Ou plutôt, il n’y a pas de clients.

En fait, seule la climatologie rapporte un peu d’argent, entre 65 et 85% des redevances collectées. Mais c’est la saison des soldes : −42 % depuis 2010.

Mise à part (peut-être?) la branche commerciale de MF (non comptabilisée ici), personne ne semble avoir acheté l’intégralité d’un jeu de donnée. Et pourtant, ce ne sont pas les usages qui manqueraient. Je suis premier à le savoir, et il n’y a qu’à voir la prolifération des données américaines partout sur le web.

Face à un tel constat, un grand nombre d’arguments s’écroulent. Il n’y a plus aucunes excuses pour ne pas ouvrir les robinets.

Là je suis un peu trop overbooké. Mais croyez-moi, dès que j’aurai un peu de temps je vais sérieusement me pencher sur le sujet !

On ne peut pas communiquer en disant que « le nouveau supercalculateur va faire gagner 10 milliards par an à l’économie », si dans le même temps on empêche un secteur entier de se développer, en bloquant l’accès aux données, tout ça pour récupérer des clopinettes.

Je vous invite à lire le « Plaidoyer pour des données européennes libres » que vient de publier mon confrère Francis Fustier.

On se consolera quand même en se disant que c’est « grâce » à ce blocage que je me suis lancé dans cette aventure météo, et que sans ça, je me serai vachement moins amusé !

Le premier supercalculateur d’Open Meteo, dans ma chambre chez les parents, il y a un peu moins de 2 ans. J’avais fait installer 3 lignes ADSL  − en plus de la familiale − pour envoyer les résultats sur le serveur.


« Si vous voulez pas me donner vos prévis, je vais faire les miennes ! »

2 réflexions sur « Comment j’ai failli faire doubler le chiffre d’affaire de Météo-France »

  1. A noter que meteo france vend des prévisions et des données foudre aux gestionnaires de réseaux électriques par exemple. Et sans doute à d'autres. Je ne sais pas si ça éclaire ton questionnement ?

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